mercredi 17 juin 2009

Bernard Werber ou l'anti-philosophie

Sur plein de sites et de forums, je vois écrit que les livres de Bernard Werber sont truffés de symboles spirituels et d'idées philosophiques cachées. Autant l'annoncer directement, si c'est là votre vision des choses, il vaut mieux la réviser un peu beaucoup.

Étant donné que cet article risque fort de descendre Werber, autant que je commence par ce que j'aime chez lui car tout n'est pas à jeter, loin de là. Je trouve en effet qu'il s'agit d'un bon écrivain, un des rares encore correct ayant su allier le fantastique/SF avec le grand public actuellement. Et honnêtement, les fourmis restent parmi mon top 50 des livres (vers la 40ème place on dira, ce qui n'est pas rien: c'est comme si on plaçait un mec d'la Nouvelle Star parmi Hendrix et Beethoven). Enfin bref tout ça pour dire qu'à l'époque des fourmis (tome 1 je précise), Werber c'est fluide et ça se lit bien dans le train tout en ayant plus de qualité que la soupe fournie par Marc Lévy ou Guillaume Musso.
Mais là n'est pas la question. Le propos ici n'est pas de juger des qualités littéraires de Werber mais bien du côté philosophe/visionnaire/gourou/génie que certains lui accordent.

Alors, non, non, cent fois non, il n'y a aucun message caché dans les livres de Werber. Les allusions philosophiques ou spirituelles sont encadrées, soulignées et répétées au cas où c'est pas rentré. Et c'est bien ça le problème. Les deux premiers tomes des fourmis par exemple sont encore supportables à ce niveau là mais le troisième devient tellement téléphoné. On sait presque avant l'auteur lui même ce qui va se passer. Genre "Hey regardez, ça ressemble à une remarque anodine mais c'est la notion autour de laquelle la suite va tourner. Et pour que vous saisissiez bien le truc, je rajoute un personnage qui l'explique à la page suivante".

Et encore si ce n'était que ça mais non. Werber ne fait pas de philosophie ni de spiritualité, il reprend des lieux communs, les enroule dans un cape pour faire mystérieux et les ressort comme ça. Et c'est là que le bât blesse. Plein de gens croient avoir affaire à des idées de haut niveau alors qu'ils bouffent du réchauffé. Un peu comme un sac à main carrefour sur lequel on aurait collé un logo Gucci. Alors d'accord si ça peut servir d'introduction, si c'est pour donnner envie de se tourner vers la philosophie ensuite, je suis tout à fait pour: j'ai bien commencé à écouter du métal par Linkin Park. Mais si c'est pour faire de Werber un génie et un maître à penser alors c'est tout le contraire de la philosophie.

Alors, grandes idées cachées: non, réflexions profondes: non, visionnaire et philosophe: non. Il faut prendre Werber pour ce qu'il est, un bon auteur (parmi les best-sellers actuels bien sûr) qui épice (malheureusement beaucoup trop) ses histoires de liens avec des lieux communs philosphiques et spirituels pour parler à tout le monde et donner une apparence de profondeur là où il n'y a qu'une histoire.
Il a malheureusement tendance, en général depuis la fin des fourmis, à fournir trop de sauce et pas assez de viande comme dans "Le papillon des étoiles" par exemple. Je m'explique, l'idée de base est géniale, le développement sympathique (bien qu'il commence à partir un peu de travers) mais la fin ridiculise tout le livre par ce caractère pseudo philosophique qui la fait tomber dans un cliché baveux. C'est un peu le contraire avec "Le Mystère des dieux", l'idée de la fin est excellente mais elle est gâchée par tout le reste du bouquin qui l'introduit lourdement en insistant bien trop sur le concept de mise en abyme et surtout par le délire dans lequel part l'auteur avec ses personnages.
Si vous n'avez pas lu ces deux livres, inutile de préciser que je ne les conseille pas. Lisez plutôt la trilogie des fourmis (en excusant le troisième tome, on dira qu'il a dû faire un truc vite fait, pressé par son éditeur) ou dans un autre style, prévisible mais sans être lourd, "Nos amis les humains".

Ps: Oui, il s'en prend beaucoup dans la tête mais c'est parce qu'il m'a beaucoup déçu. Ses premiers livres (avant un trop grand succès) étaient de qualité. Je m'attendais enfin à un bon auteur de fantastique/SF francophone qui aurait pu apporter quelque chose et je me retrouve avec un mec imbu de son succès qui se contente de copier-coller ce qui a plu aux gens dans ses bouquins pour en faire un nouveau. Enfin, si je ne lui accordais vraiment aucune qualité ni aucune valeur, je n'aurais pas passé du temps à écrire ça (même si je m'ennuie méchamment).

2 commentaires:

  1. La question de savoir si Werber est un maître à penser ou simplement un vulgarisateur voire un pasticheur n'est elle pas secondaire? Par exemple, à la lecture de "Nous les Dieux" (dont je n'ai pas toujours apprécié le style narratif, l'intirigue ou même certains parti pris audacieux) j'ai entrevu une manière différente d'envisager l'Histoire. J'aurais bien aimé que tu approfondisse dans ton article quelles sont les idées traitées (ou mal traitées) par Werber en quoi elles sont nouvelles ou déjà anciennes. Et surtout, d'où elles viennent vraiment.

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  2. Je pense q'avant tout il essaye simplement de faire circuler des idées, des concepts, mixés à sa sauce tout au long de ses romans.
    Par exemple, on pourrait le qualifier d'utopiste : Il aimerait une meilleure société dans laquelle vivre et il essaye de la mettre en place dans ses livres, tout comme d' autres auteurs. Même si ce n'est qu'un ramassis d'idéaux, il en montre le meilleur a travers sa "simple histoire" comme tu dis.
    Te crois tu capable de faire mieux ? Avec autant d'énigmes mathématiques, physiques, psychologiques et en abordant des thèmes facilement criticables mais difficiles a amorcer comme l'homosexualité (présente dans au moins deux de ses romans) ou la religion ? Il prône la tolerance. Vieux concept soit. Mais il le remet au gout du jour.

    Après, tu critiques son style d'écriture. Mais ça, ça plait ou ça plait pas. On peut apprecier Nietzsche et ne pas supporter de lire twilight de stephenie Meyer. Non?

    Enfin, qui peut se permettre de dire que cet écrivain est un génie et qu'un autre est sans importance? Seul les répercussions de son art dans le temps pourront en juger. Mozart n'était qu'un compositeur de la cour a son époque mais sa vraie valeur a été reconnue bien des années après sa mort et finalement de nos jours, tout le monde le connait. Werber est un de nos contempirains alors ce n'est pas a notre génération de statuer sur lui.

    En tout cas, merci d'avoir exposé ton point de vue.

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