samedi 9 janvier 2010

Vrai et faux

A partir d'une seule proposition fausse, on peut démontrer ce que l'on veut sans jamais enfreindre les lois de la logique et en n'utilisant que des propositions vraies par ailleurs.

Faisons jaillir le faux du faux.
Démontrons que je suis Einstein à partir de la proposition erronée 4x8=36. Ca paraît audacieux mais puisqu'on est parti d'une proposition fausse, tout est possible.
On a 4x8=36, on va diviser par 4 des deux côtés de l'équation, on se retrouve donc avec 8=9. Il suffit ensuite de soustraire 7 à chacun des membres pour obtenir 2=1. Einstein et moi sommes 2 personnes différentes, or 2=1 donc Einstein et moi sommes la même personne. CQFD.

Mais d'une proposition fausse ne jaillit pas forcément un résultat faux.
On a 4x8=36 soit 8=9 soit 2=1. Le 2 de gauche vaut donc 1. On a donc 1=1, ce qui est indiscutablement vrai.

Ainsi, à partir d'une seule proposition erronée, il est possible de tirer n'importe quelle conclusion même si l'on n'utilise par ailleurs que des propositions vraies.
L'avantage est que, pour détruire un raisonnement, il suffit uniquement de prouver qu'une des propositions utilisées est fausse.
En revanche, si une proposition fausse passe dans un raisonnement sans être relevée alors ce raisonnement peut conduire à tout. Il est donc crucial de bien passer au crible les propositions de son adversaire lors d'un débat et de ne pas concéder un élément trop hâtivement.

Quoiqu'il en soit, à partir du vrai ne peut jaillir que du vrai ou bien les lois de la logique ont été biaisées quelque part. Ce genre d'erreur arrive souvent lorsque l'on prend le contraire d'un énoncé et ce procédé est souvent utilisé par les politiques, de façon flagrante quand ils sont mauvais et insidieuse quand ils sont bons.
Par exemple, le contraire de "Tous les moutons sont noirs" est "Il existe au moins un mouton qui n'est pas noir" et non pas "Il existe au moins un mouton blanc" ou pire "Tous les moutons sont blancs".

En conclusion, tenez-vous en au vrai et au vérifié, vous n'en tirerez que du vrai.

Et un dernier exemple pour la route parce que j'aime bien ce genre de raisonnement: à partir de la proposition "Les cachalots volent", montrons que je suis un extra-terrestre.
Les cachalots volent, ils peuvent donc se déplacer dans l'atmosphère. Or, les cachalots ne peuvent se déplacer que dans l'eau. L'atmosphère est donc constituée d'eau.
Je ne peux pas vivre dans l'eau. Or, l'atmosphère est constituée d'eau donc je ne peux pas vivre sur Terre.
Je suis donc un extra-terrestre. CQFD.

vendredi 8 janvier 2010

Trois réflexions au hasard

Il est impossible de faire partager une sensation. Même les plus banales d'entre elles comme la vision d'une couleur.
La maîtresse me dit: "Les arbres sont verts." D'accord mais je suis pas plus avancé, moi. C'est quoi le vert?
Le physicien me dit: "Le vert c'est une onde électromagnétique d'une longueur d'onde de l'ordre de 550 nanomètres dans le vide." D'accord. Et le vert c'est quoi?
Le vert n'est que le nom que l'on donne à la sensation que l'on perçoit quand on regarde une pelouse par exemple. Mais la sensation en elle-même n'est pas communicable. Rien n'empêche d'imaginer que je perçois le vert comme vous percevez le rouge. Cela ne change strictement rien étant donné que quand on dira que les arbres sont verts, on aura tous raison même si nos sensations sont différentes. On peut imaginer ensuite les mêmes choses pour toutes nos sensations sans trop de difficulté.
On vit donc tous dans un monde entièrement personnel et indescriptible. Ce qui nous tient liés n'est que notre capacité à communiquer, à avoir un consensus pour désigner un objet.


Le physicien Martin Rees a écrit un livre ("Just Six Numbers") qui explique que si parmi 6 constantes fondamentales de la physique, une seule était différente, ne serait-ce qu'un tout petit peu, l'univers n'aurait pas pu abriter la vie. Bon nombre de gens y voient l'influence de Dieu, fixant les 6 constantes précisément pour que la vie se développe.
C'est faire la grosse erreur de croire que parce que nous existons, l'univers est comme ça. C'est se placer au centre, comme on a trop souvent tendance à le faire. Il est plus sérieux de penser que nous existons parce que l'univers est comme ça.
Bien sûr la différence ne saute pas aux yeux a priori mais elle est pourtant de taille. Nous ne parlons d'univers et de constantes fondamentales que parce que l'univers est justement tel qu'on a pu y apparaître. Rien ne nous empêche d'imaginer de multiples univers se développant l'un après l'autre ou bien en parallèle et que seul le nôtre soit capable de donner naissance à la vie.
Il en va de même pour la Terre qui semble avoir été "placée" parfaitement sur une orbite quasi-circulaire dans le système solaire, à la juste distance d'un Soleil unique de bonne taille et sous la protection gravitationnelle de Jupiter qui détourne les astéroïdes dangereux. Mais quand on songe à la quantité de planètes dans l'univers, une configuration si particulière n'est plus si improbable.
La probabilité de gagner au Loto est très faible, mais si on joue suffisamment de grilles, il y en aura forcément une de gagnante.


"Cette phrase est fausse." "Je suis en train de mentir." On a là deux jolis exemples de paradoxes. On ne peut tout simplement rien dire.
"On est comme tout le monde, unique." On se dit qu'on a un nouveau paradoxe. Mais en réalité, il n'y a aucun problème dans cette phrase malgré sa contradiction a priori. C'est juste qu'on a tendance à considérer que "unique" est déterminant comme "grand, idiot, violet..." Mais alors que ces derniers représentent une relation d'égalité X=Y, l'unicité signifie seulement que X est différent de Y. Ainsi la première relation fixe X alors que la seconde le laisse indéterminé et ne lui donne qu'une petite propriété.
N'ayez donc pas peur de partager votre unicité avec les autres, vous n'en aurez pas moins.